Nouveaux modes de management, sens et engagement au travail

Comment engager les salariés avec de nouveaux modes de management ?

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Alors que de nombreux économistes s’intéressent de plus en plus au sens du travail, au-delà de la simple notion d’arbitrage coût/bénéfice, 48% des salariés en moyenne déclarent manquer d’autonomie dans leur travail. Le travail n’a pas de sens intrinsèque, on doit le lui donner”, affirme Thibaud Brière, philosophe d’entreprise, lauréat de l’Académie des sciences morales et politiques et spécialiste des nouvelles formes de management et d’organisation (NFOT). Ceci explique peut-être pourquoi de nouveaux modes de management apparaissent. Quels sont-ils et quelles conséquences peuvent-ils avoir sur l’engagement des collaborateurs ?

A l'occasion de la sortie de son tout dernier chef d’œuvre sur les nouvelles formes de management, intitulé « Toxic management » (aux éditions Robert Laffont), Thibaud Brière était notre invité d’honneur au cours de notre webinar sur les nouveaux modes de management et leur impact sur l’engagement des salariés. Il y présente des idées pionnières pour mettre en place de nouveaux modes de management, en intégrant davantage d’autonomie et de confiance, en valorisant leurs avantages et en nous mettant en garde contre les dérives qu’ils peuvent entraîner.

 

Accédez au replay du webinar avec Thibaud Brière

Nouveaux modes de management : quels impacts sur l’engagement des salariés

Définition des nouveaux modes de management

De nombreux concepts se sont développés autour des nouvelles formes de management : intrapreneuriat, télétravail généralisé, entreprises libérées ou apprenantes, expérience de sociocratie et d’holacratie, équipes autonomes ou encore auto-organisation.

Ces nouvelles formes de management ont pour but de dépasser les limites du management traditionnel, qualifié de « management infantilisant » et très souvent rattaché à la notion de « command and control ». Cette expression sous-entend que les collaborateurs adoptent des comportements dits « corporate » sans véritable adhésion. Selon Thibaud Brière, ce management traditionnel apparaît comme un système incapable de susciter de l’engagement ou de la confiance car il motive généralement les collaborateurs autour du concept de récompenses - par le biais de stimulus établis - et non d’un système fondé sur un réel engagement.

Dans ce contexte, les NFOT entrent en jeu pour restaurer cet engagement et développer des relations de confiance en entreprise dans le but de partager une même vision et d'aller ensemble vers les mêmes objectifs. Les NFOT recentrent l’humain au cœur de l’organisation, de manière autonome et responsable. Elles mettent également l’accent sur un fonctionnement plus participatif pour mobiliser les collaborateurs autour de valeurs, de récits (phénomène de storytelling) et de sens.

Les avantages des nouveaux modes de management

Les entreprises deviennent plus agiles et performantes lorsqu’elles trouvent un certain équilibre entre engagement et développement. Elles y parviennent en rendant les circuits décisionnels plus courts, en rapprochant les centres de décision des centres d’exécution, et plus généralement en réduisant la bureaucratie.

Les NFOT se caractérisent par :

  • Une volonté d’aplatir la pyramide hiérarchique au sein des entreprises : réduire le nombre d’échelons hiérarchiques de manière à ce que chaque collaborateur ne se sente pas asphyxié par des boucles incessantes de validation des projets.
  • Des actions de responsabilisation de chaque salarié pour offrir un cadre de travail plus autonome, donc plus épanouissant, motivant et performant.
  • Une démarche positive pour redonner du pouvoir au collectif et aux pairs, à travers la valorisation d’actions, de nouvelles pratiques et de signes de soutien, sans prise de position hiérarchique.

Ces nouvelles formes de management permettent de générer plus d’échanges, de sens, de participation, d’autonomie et, in fine, plus d’engagement collaborateur.

 

l'engagement des collaborateurs

 

Les défis des nouveaux modes de management

Malgré de nombreux avantages, les nouveaux modes de management apportent avec eux des défis majeurs et de potentielles dérives :

  • Un risque d’emballement collectif qui peut perturber le discernement individuel. Les collaborateurs s’approprient et acceptent  les rouages organisationnels jusqu’à en perdre leur identité individuelle.
  • Un risque d’emprise par les pairs eux-mêmes qui peut entraîner une pression plus forte que celle exercée par un manager : cette pression est plus diffuse, entraînant un sentiment de contrôle plus fort et plus subtil, presque invisible.
  • Le développement d’un faux sentiment d’engagement, de liberté et d’autonomie instauré par le manager.
  • L’apparition de comportement salariés très formatés, pouvant aboutir à une forme d’aliénation. Ces profils sont parfois qualifiés de « moines soldats » ou encore de « fanatiques de l’entreprise ».

Il et donc primordial de maîtriser le curseur des nouveaux modes de management appliqués en entreprise pour préserver un discernement critique, susciter des controverses et conserver une certaine médiation hiérarchique au sein des organisations.

Le nouveau rôle du manager

Le manager n’est plus seulement attentif au « comment », c’est-à-dire aux process et manières de procéder des collaborateurs, dans le respect des règles et méthodes de l’entreprise. Désormais, dans les nouvelles formes de management, il devient d’avantage le garant du « pourquoi », en veillant à ce que chacun comprenne bien son rôle et ce qu’on attend de lui, de sorte qu’il puisse librement prendre ses responsabilités pour s’épanouir.

Porteur de sens et de transparence, le nouveau manager doit s’assurer que l’environnement de travail corresponde à un environnement dans lequel les collaborateurs peuvent se développer. Pour ce faire, les évaluations à 360° constituent une réelle solution pour obtenir une vision objective et constructive des forces et faiblesses de chaque collaborateur pour mieux les développer. Le nouveau manager a également à sa disposition de nouveaux formats d’enquêtes de satisfaction salariés. Deux en un, ils permettent à la fois de prendre le pouls des salariés sur des thématiques spécifiques à chaque entreprise, et, à la fois, d’organiser des réunions de restitution des résultats auprès des équipes, à vocation informative mais aussi fédératrice et cohésive.

 

Les 3 modes de communication selon Mehrabian

 

7 nouvelles techniques managériales pour développer l’engagement

La participation, la subsidiarité et la responsabilisation sont des clés pour bâtir un environnement plus engageant dans un cadre hiérarchique presque horizontal, fonctionnant en silos. Voici 7 moyens pour les déployer au sein des équipes :

  • 1er moyen - L’autonomie. Le management doit lâcher prise et laisser à chacun la possibilité de se réaliser et de se réapproprier la notion de succès et d’échecs.
  • 2ème moyen - La clarté. S’assurer de rester toujours clair sur les missions de chacun en définissant des périmètres de responsabilisation et de compétences.
  • 3ème moyen - Les échanges constructifs. Organiser des réunions régulières pour partager des retours d’expérience, faire part des succès et des échecs rencontrés et échanger sur des points de vue divergents.
  • 4ème moyen - Le recueil de feedbacks horizontaux. Lancer des évaluations à 360° pour évaluer de manière objective les managers sur une base horizontale : par les managés - par les pairs - par les n+1 du manager.
  • 5ème moyen - Passer de l’argument d’autorité à l’autorité des arguments. Mettre en avant la qualité de l’idée émise en plaçant tous les collaborateurs sur le même pied d’égalité.
  • 6ème moyen - Offrir un cadre de responsabilité à chaque collaborateur. Responsabiliser chaque membre d’une équipe, à l’échelle individuelle, dans un but collectif. Par exemple : désigner un responsable de la QVT sur un périmètre et un domaine clairement établis.
  • 7ème moyen - Prôner la participation. Animer les réunions de manière participative pour susciter une dynamique de groupe.

Comment engager les collaborateurs pendant une réunion ?

Lors de leur déroulement, les animateurs qui sont généralement les managers doivent :

  • Davantage questionner qu’affirmer.
  • Ne pas imposer de points spécifiques à traiter.
  • Laisser les collaborateurs amener les idées à l’ordre du jour pour que ces moments d’échange se fassent par tous et pour tous, de manière ascendante.
  • Vérifier la motivation de chacun en posant des questions nominatives.
  • Valoriser systématiquement les points de vue dissonants pour développer et garantir le discernement critique au sein de l’équipe et l’effusion d’arguments.


A travers ces nouvelles formes de management dans lesquelles l’humain est au cœur du processus, il est important de rappeler la règle suivante : plus les équipes se sentent libres pour décider par elles-mêmes, plus il est important de veiller à maintenir une place à la contradiction. Valoriser l’impertinence et renforcer l’esprit critique au sein des équipes constituent une réelle force. Ce concept se nomme « fécondité de la contradiction » et permet de se protéger du dogme du consensus à tout prix, dangereux pour les organisations.